Interview d’Ismaël Dupont, Conseiller Départemental

Peux-tu te présenter pour les personnes qui ne te connaissent pas encore ?

 

J’ai 42 ans, 2 enfants de 20 ans et 16 ans. Professeur de philosophie entre 2004 et 2010, puis professeur documentaliste depuis 2011, je suis militant communiste depuis 2006 et élu à Morlaix depuis 2014, d’abord dans l’opposition de gauche au maire de l’époque, puis dans la majorité depuis juin 2020. Parallèlement, depuis le printemps 2015, j’exerce la responsabilité de secrétaire départemental du PCF dans le Finistère. Depuis deux ans, je suis premier adjoint à Morlaix, adjoint auxFinances et aux Ressources Humaines, en binôme avec un conseiller délégué, également communiste, Patrick Gambache, également responsable de majorité à Morlaix, où nous avons 8 élus communistes et sympathisants. Et enfin, en juin 2021, j’ai été élu en binôme d’union de la gauche avec Gaëlle Zaneguy (Divers gauche) comme conseiller départemental du canton de Morlaix.

 

Quel bilan fais-tu à bientôt un an de ton arrivée au conseil départemental ?

 

Les premiers pas au Conseil Départemental sont impressionnants. C’est une institution, avec une salle d’assemblée imposante, son protocole, du personnel et des moyens de fonctionnement pour les groupes. Mais on a très vite été mis dans le bain par les anciens de notre équipe de gauche qui, même dans l’opposition, continuent à structurer le groupe et à partager leur expérience avec l’ensemble des 22 élus de gauche de notre groupe d’union composé d’élus PS, d’élus PCF, et de divers gauche sans affiliation partisane (il y a aussi 2 élus Nouvelle Donne et écologiste et 2 élus régionalistes du canton de Carhaix qui forment deux groupes à part, la droite de l’Alliance et le président du Département de Calan n’ayant qu’une majorité courte de 2 voix sur la gauche) ses deux animateurs, Kévin Faure et Armelle Huruguen. Je suis déjà intervenu plusieurs fois en séance plénière, notamment sur les questions liées à la Dépendance, au grand âge, à la prise en charge de la perte d’autonomie, ou encore sur les questions relatives aux droits des personnels. Les échanges ont été parfois très vifs et cassants avec Maël de Calan et un certain nombre d’élus de sa majorité qui n’aiment pas beaucoup les communistes, ou en tout cas font de la provocation connaissant mes engagements. Au sein de ma commission Affaires Sociales, les relations sont tout à fait courtoises et il est possible de travailler dans un climat serein. Je me sens aussi à l’aise dans le groupe avec les collègues de gauche avec qui nous avons de bons rapports et travaillons dans une bonne ambiance, avec de nombreuses valeurs partagées. Avec ma binôme Gaëlle Zaneguy, très travailleuse, dynamique et déterminée, nous formons un binôme complémentaire je crois. Nous bénéficions aussi du bon bilan de nos prédécesseurs conseillers départementaux du canton de Morlaix, Solange Creignou et Jean-Paul Vermot, dont l’action pour le Département dans le cadre de leurs délégations a inspiré le respect. J’ai encore beaucoup à apprendre : les dossiers de l’action sociale sont très techniques, et la législation est mouvante. J’aime la relation aux associations, aux citoyens, aux élus, en lien avec nos compétences départementales, même si nos marges de manœuvre sont bien sûr bien moins importantes que si nous étions dans la majorité. Les enjeux politiques du Conseil Départemental ne sont pas négligeables car il y a beaucoup de compétences du quotidien (les collèges, le RSA et l’insertion, les allocations perte d’autonomie et handicap, les politiques personnes âgées, protection de l’enfance, le SDIS et les pompiers, les routes et voies cyclables, des musées, l’aménagement du territoire et le développement des territoires) mais les compétences du Conseil Départemental sont méconnues. Maël de Calan est un communicant qui fait feu de tout bois mais dans les faits, il tend parfois à déconstruire des politiques cohérentes, appuyées sur des priorités politiques en lien avec des objectifs de solidarité et écologiques, par des politiques de guichets, avec un risque de clientélisme et de saupoudrage des moyens sans critères clairs que l’on voit notamment avec la nouvelle formule des Contrats de Territoire (« Pacte Finistère », à notre avis moins lisible et facile à manier que les anciens dispositifs. Il ramène beaucoup la gauche à certaines carences affirmées du bilan des équipes majoritaires sortantes. C’est de bonne guère en début de mandat mais, bientôt, lui aussi aura un bilan, et en dehors du verbe haut, on pourra juger à l’efficacité de l’action. Il y a des inflexions que ne me conviennent pas du tout : sur les allocataires du RSA, les accompagnés de l’insertion, les facilités données aux groupes privés d’hébergement des seniors, les mineurs isolés, la politique du chiffre et du management libéral où l’on retrouve beaucoup d’éléments de langage et de politique du sarkozysme. Mais bon, nous serons là pour jouer notre rôle d’opposants, et surtout tacher de toujours garder le lien avec les associations, les professionnels, les personnels, les élus, les citoyens.

 

Quel est ton rôle au sein du conseil départemental et dans le groupe Finistère &solidaires?

 

Je suis membre de la coordination du groupe Finistère & Solidaires et de la Commission Action Sociale (Perte d’autonomie, personnes âgées, handicap, lutte contre l’exclusion, solidarités). Le groupe Finistère & Solidaires vit bien avec 22 élus de gauche investis, où nous sommes 3 élus communistes et apparentés, avec Jacqueline Héré, Isabelle Maugeais, et moi-même. Nous nous réunissons toutes les semaines pour des réunions du groupe d’union de la gauche où nous débattons de la vie du département, des ordres du jour des commissions thématiques, des commissions permanentes, et des séances plénières, construisons collectivement nos décisions et nos interventions publiques. Nos réunions à Quimper ont lieu le lundi, nous avons en plus une activité de canton : présences dans les Conseils d’administration de collèges, d’EHPAD, rencontres avec les maires et les élus locaux, invitations des associations sur leurs évènements, Assemblées Générales.

 

Tu sièges aujourd’hui dans l’opposition au département, la tache n’est-elle pas trop difficile ?

 

Cette tâche est difficile au sens où elle est frustrante, où on a pas accès à la décision, et pas toujours non à l’ensemble des informations ou des scénarios préalables à la décision. Dans la mesure où il faut souvent subir aussi des discours un peu arrogants et donneurs de leçons de la majorité. Mais on a un groupe d’opposition qui tient la route, où il existe un mélange de talents, d’expérience, de sens des réalités, et de volonté de travailler. Ensemble, avec Finistère & Solidaires, on constitue une opposition structurée et forte car elle travaille les dossiers en amont et échange beaucoup. Pour un nouvel élu départemental, comme moi, comme pour Jacqueline Héré et Isabelle Maugeais, c’est aussi rassurant. De mon côté, en assemblée plénière, j’ai l’habitude de l’opposition et les joutes oratoires ne me font pas peur, même si elles sont parfois très musclées. Je suis là avant tout pour affirmer des valeurs et des intérêts, ceux de la prise en compte de moins privilégiés, du refus de la démission face à la souffrance sociale, de la volonté de construire des politiques qui réduisent les inégalités à tous les niveaux.

 

 

 

Je trouve qu’il est particulièrement inadmissible de jouer sur les préjugés hostiles aux allocataires des minima sociaux ou aux jeunes migrants mineurs isolés. Je trouve les politiques de culpabilisation des privés d’emplois et des allocataires du RSA particulièrement odieuses de la part, par exemple, de quelqu’un qui touchait des salaires mirifiques chez Mc Kinsey, en plus de ses dividendes, et qui est né de toute façon avec une cuillère en argent dans la bouche. La violence de classe, on la vit parfois dans certaines attitudes, certaines postures condescendantes, ou dans des certitudes assénées sans preuve au Conseil Départemental. Après, tout n’est pas à jeter dans les politiques de l’actuelle majorité, qui sur plusieurs aspects prolonge les décisions et politiques de la majorité précédente et sur plusieurs orientations et délibérations, nous pouvons être en accord. Nous essayons d’être une opposition sérieuse et constructive et de nous concentrer sur les vrais sujets. Il y a plusieurs points de clivage gauche/droite qui se révèlent et vont se révéler encore plus avec le temps : sur la part du privé à but lucratif dans l’accompagnement des personnes âgées en perte d’autonomie, sur l’accompagnement des écoles privées, sur l’économique, le social, la protection de l’environnement et l’écologie. Nous avons un rôle important à jouer pour montrer que des alternatives existent, pour informer et mobiliser sur des enjeux forts en lien avec les intérêts des Finistériennes et Finistériens.

 

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