Les élus communistes brestois reçoivent Salah Hamouri en mairie annexe de Bellevue

Quel grand honneur et quelle grande joie pour le groupe des élus communistes d’avoir reçu hier, avec Claude Leostic de l’AFPS, notre compatriote et camarade franco-palestien Salah Hamouri.

Salah Hamouri, avocat , a été incarcéré durant 403 jours dans une prison israélienne sous le régime arbitraire de la détention administrative, c’est-à-dire sans aucun jugement, sans aucune inculpation. Cette procédure, renouvelable à l’infini, est contraire au droit international.

Nous devons sa libération, le 30 septembre dernier, à une mobilisation extraordinaire qui a su rassembler une diversité de personnalités, d’associations, d’élus, de citoyens.

180 élus finistériens avaient cosigné une lettre adressée au Président pour demander sa libération. Un vœu avait été voté par conseil municipal de la ville de Brest.

La mobilisation locale et nationale a payé. Aujourd’hui, il est libre !

Il faut maintenant continuer à prendre toutes les initiatives politiques nécessaires à la libération de tous les prisonniers politiques palestiniens et plus largement du peuple palestinien tout entier.

AFPS : http://www.france-palestine.org/

AFPS Brest : https://www.facebook.com/afps.brest/


Interview de Salah Hamouri par Gwendal Hameury, le Télégramme, Morlaix, 18 décembre 2018

Salah Hamouri, avocat franco-palestinien de 33 ans, était l’invité d’honneur de l’Association France Palestine Solidarité, le 30 novembre, à Plourin-lès-Morlaix (29), dans le cadre du Festival des Solidarités. Il est revenu, à cette occasion, sur ses 13 mois de captivité dans une prison israélienne et sur le sort des Palestiniens dans l’État hébreu. Un témoignage qu’il renouvellera ces mercredi et jeudi, à Carhaix, Brest et Quimper (*).

Vous avez été libéré le 30 septembre, après plus d’un an de détention dans les geôles israéliennes. Comment allez-vous ?

« Ça fait vraiment du bien d’être libre. C’est un sentiment compliqué à décrire avec des mots… Cet emprisonnement a été d’autant plus difficile à vivre que ma femme, qui est française, et notre fils étaient interdits de séjour en Israël – ils le sont toujours -, et ne pouvaient donc pas me rendre visite. Une fois libéré, j’ai fait au plus vite pour venir les retrouver en France ».

Que vous reprochait Israël ?« J’ai passé 13 mois en détention administrative et je ne sais toujours pas pourquoi. La détention administrative est une loi qui a été créée sous le mandat britannique avant l’occupation de 1948, et qui permet à l’armée israélienne d’arrêter n’importe quel Palestinien et de l’emprisonner pendant plusieurs mois, par périodes renouvelables, ad vitam, sur la base d’un dossier qui reste secret. Ni moi, ni mon avocat ne savons ce qu’il contient. Je sais juste que c’est le ministre de la Défense qui a signé l’ordre de m’arrêter pour une période initiale de six mois. Et qu’on me considère comme un danger pour la sécurité d’Israël. Mais je ne suis pas le seul. Nous sommes plusieurs centaines, comme ça ».

Comment s’est déroulée cette détention ?

« Les prisons israéliennes sont faites pour briser mentalement les prisonniers politiques palestiniens. On est à l’isolement total. Collectivement. Moi, j’étais détenu à Neguev, au Sud, dans le désert, près de la frontière égyptienne. On était 1 600. Coupés du monde. Le seul lien avec l’extérieur, mais ce n’est pas valable pour tout le monde, c’est la visite de la famille très proche (père, mère, frères, sœurs), une fois par mois. On a le droit à 45 minutes au téléphone, derrière une vitre. Et tout est enregistré. On fait donc attention à ce que l’on dit, de peur que ce soit utilisé ensuite ».

Déjà en 2005, vous aviez été inculpé pour avoir projeté l’assassinat du rabbin Ovadia Yossef et pour votre appartenance présumée au Front populaire de libération de la Palestine (FPLP)…

« C’est une vieille histoire. J’ai été condamné à sept ans de prison pour cela. J’avais accepté un plaider coupable pour éviter une peine de 14 ans, mais il n’y avait rien de précis dans le dossier ».

Êtes-vous membre du FPLP ?

« Ce n’est pas une question à laquelle je peux répondre. Le FPLP est considéré comme une organisation terroriste. Ce n’est pas du tout comme en France où on peut dire que l’on est communiste, socialiste… Là-bas, toute appartenance à un parti politique est interdite. Je ne peux pas dire si je suis membre ou pas ».

Vous considérez donc qu’il s’agit d’un acharnement de l’État d’Israël vis-à-vis de votre personne et des Palestiniens en général.

« Bien sûr. Depuis 1967, environ 850 000 Palestiniens sont passés par les prisons israéliennes ; il y a eu 215 morts. C’est 30 % de la société qui est touchée. Aujourd’hui, il y a plus de 5 000 prisonniers palestiniens, dont 250 enfants et 62 femmes… 80 d’entre eux sont incarcérés depuis plus de 25 ans. C’est un système destiné à faire pression. On veut clairement nous chasser de Palestine. Personnellement, j’ai déjà été détenu à quatre reprises. La première fois, j’avais 16 ans ».

Le simple fait d’être Palestinien ferait de vous un danger pour Israël ?

« Pour eux, oui. Car je refuse d’accepter la situation. Et puis je suis avocat. Je n’ai jamais caché que je voulais défendre les prisonniers politiques ».

Étiez-vous au courant qu’en France, vous étiez soutenu par le monde associatif et une partie de la classe politique ?

« Un peu seulement, grâce à ma famille. Car, contrairement à ma précédente détention, l’administration avait cette fois interdit de faire entrer des lettres. Même les livres en français m’étaient interdits ».

La diplomatie française a-t-elle fait ce qu’il fallait pour faciliter votre libération ?

« Clairement, non. Pour des Français détenus en Turquie ou au Mexique, elle est intervenue, quitte à créer un incident diplomatique. Mais pour moi, rien. Les démarches étaient trop timides, pour ne pas énerver Israël. Il ne faut jamais brusquer Israël ».

Pourquoi avez-vous accepté de venir à Plourin-lès-Morlaix, puis à Carhaix, Brest et Quimper ?

« Pour remercier tous les gens qui se sont mobilisés pour ma libération. Et je sais qu’en Bretagne, ils ont été très actifs (il a été fait citoyen d’honneur de la ville de Carhaix, NDLR). Leur combat ici est important et efficace pour la cause palestinienne. Je suis venu aussi, à la demande de l’Association France Palestine Solidarité, pour évoquer la vie des prisonniers politiques en Israël ».

Vous avez l’intention de retourner vivre en Palestine. N’avez-vous pas peur d’être de nouveau arrêté ?

« La Palestine est mon pays. J’y suis né. Bien sûr que je vais y retourner. Même si les Israéliens m’ont bien fait comprendre que j’avais tout intérêt à rester vivre en France. Mon combat va être de permettre à ma femme et à mon fils de me rejoindre. Il fait savoir qu’en tant que Palestinien de Jérusalem, je n’ai qu’une carte de résidence temporaire. Si je quitte le pays plus de six mois, je la perds. Et on ne me laissera jamais plus rentrer. Quant à une nouvelle arrestation… Ça peut arriver ».

Que pensez-vous du rôle des États-Unis dans le conflit israélo-palestinien ?

« Il faut dire clairement les choses ici. Les États-Unis se servent d’Israël, depuis sa création, comme d’une base armée avancée pour le Proche-Orient. Et ce que vient de faire Trump, en déménageant l’ambassade des USA de Tel-Aviv à Jérusalem, c’est donner le feu vert aux Israéliens pour poursuivre leur projet de colonisation et chasser les Palestiniens de Jérusalem. C’est une décision politique très dangereuse ».

Tous les Israéliens sont-ils, selon vous, en guerre contre les Palestiniens ?

« Il y a une force d’occupation et un peuple occupé. Ça, c’est la base. Ensuite, la volonté de la société israélienne se traduit lors des élections. On voit bien quel est leur choix. C’est l’extrême droite. Les Israéliens antisionistes en faveur des droits des Palestiniens sont extrêmement minoritaires. Du côté des Palestiniens, certains seulement résistent. Mais tous refusent cette colonisation ».

Remettez-vous en cause l’existence même d’Israël ?

« Non, je ne la remets pas en cause. Mais je considère que sa création a été une erreur et une injustice historiques. Le présent le démontre ». C’est un conflit entre un peuple occupé et une force occupante

Le conflit israélo-palestinien est-il un conflit religieux ?

« C’est tout sauf un conflit religieux. Avant 1948, il y avait bien des Juifs, des Chrétiens et des Musulmans qui vivaient en paix en Palestine. Je le répète : c’est un conflit entre un peuple occupé et une force occupante. La religion est un prétexte. Moi, je suis né musulman mais je n’ai rien contre les Juifs en tant que Juifs. Ce ne sont pas les Juifs qui occupent nos rues, ce sont les Israéliens. Ce que les Palestiniens contestent, c’est la colonisation ».

Pensez-vous que la paix à une chance de voir le jour dans cette région du monde ?

« Elle arrivera dès lors qu’il y aura un respect des droits des Palestiniens. Sans cela, aucune chance. La solution des deux États est morte et enterrée, à cause de la colonisation. La seule qui vaille, c’est la création d’un État démocratique, laïc, qui garantisse le retour des Palestiniens. Un État où tous les habitants auront les mêmes droits ».

Interview de Salah Hamouri par Gwendal Hameury, chef de rédaction du Télégramme à Morlaix

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