100 ans d’engagements communistes en Finistère
Pierre Jaouen (1924-2016)
Des adhérents du PCF de Huelgoat en 2014: Pierre Jaouen, avant-dernier à droite de la photo, aux côtés de Jean-Jacques Penven, secrétaire de section
Pierre JAOUEN est décédé en 2016 Berrien. Il avait 92 ans.
Pierre Jaouen avait adhéré au parti en 1946, il a été membre du comité fédéral de 1953 à 1964, du bureau fédéral de 1954 à 1961 et du secrétariat fédéral de 1954 à 1959 il avait en charge ce que l’on appelait à l’époque « le travail parmi les paysans ». Il a été pendant quelques années secrétaire de la section d’Huelgoat et de la cellule de Berrien.
Il a exercé plusieurs activités professionnelles, cultivateur, carrier et aussi abonneur au journal « La Terre »: c’était le meilleur vendeur de « La terre » au niveau national pendant plusieurs années.
C’est au titre de cette dernière activité qu’il s’est fait connaître et apprécier par les camarades et bien au delà dans toute la Bretagne; il connaissait en effet tous les petits villages de la campagne bretonne et finistérienne et le monde paysan. Cette fine connaissance nous était très précieuse pour contribuer au développement de nos idées. Pierre Jaouen a eu une influence déterminante pour l’implantation du PCF et des idées de transformation sociale en Centre-Bretagne.
« Je garde d’un militant discret, modeste, politiquement très fin et d’une grande efficacité » écrit Piero Rainero, ancien secrétaire départemental.
C’était un vieil homme malicieux et chaleureux qui avait encore toute sa tête, la fraîcheur des idées et sa motivation politique.
C’est un exemple du dévouement et de la chaleur humaine, du sens des réalités, qui ont permis le développement du communisme rural, particulièrement dans les terres de résistance qu’ont été les Monts d’Arrée.
Témoignage de Jean-Claude Cariou sur Pierre Jaouen:
» J’ai bien connu Pierre à deux périodes :dans mon enfance , il passait chez mes parents à Plogoff ,puis un peu à Brest, en tant que démarcheur »pro »de « La Terre » , mais que mon père le voyait surtout à la Fédé ,alors en baraque ,rue Duquesne à Brest , en face de l’emplacement occupé maintenant par l’hôtel des impôts.
Mon père n’avait plus de responsabilité fédérale quand Pierre a démarré ,en 1954. Il y avait 9 ans d’écart entre eux. Mes parents auraient eu 101 ans cette année. A propos de l’hebdo « La Terre » ,je me souviens du titre surmontant un dessin d’un cheval tirant une charrue. A l’époque,
ce n’était pas du folklore , mes grands-parents petits-paysans(fermes de 5/6 ha) dans le sud-Finistère, travaillaient ainsi dans les années 50. Mon père a « bossé » dans le secteur agraire à la fédé ;il y avait une influence réelle à la campagne (sauf dans le Léon) et le journal était bien fait, avec des rubriques pointues comme les droits juridiques , le bricolage ,…Je me souviens que le directeur était Waldeck Rochet , plus tard André Lajoinie il me semble..Mais ensuite ,les lecteurs non paysans ont plutôt choisi un hebdo polyvalent comme l‘Huma- Dimanche , et La Terre a disparu avec la perte de l’électorat agricole (les petits)….et la crise de la presse écrite.
Plus tard ,j’ai vraiment rencontré Pierre dans des assemblées départementales du Parti ,à mon retour dans le Finistère… Il a envoyé une lettre très sympa à ma mère pour le décès de mon père en avril 1998. Enfin j’ai participé avec lui à plusieurs déplacements,encore il y a7/8ans, fin octobre, à la cérémonie annuelle en souvenir des fusillés de Châteaubriant,à la carrière . Il montait dans le car brestois à Morlaix (parking du Géant) parfois le seul ! »
Témoignage de Jean-Victor Gruat (ancien maire de Brennilis et adhérent de la section PCF de Huelgoat, membre du Conseil Départemental du PCF) sur Pierre Jaouen:
» Pierre Jaouen était un grand bonhomme et un grand camarade, que j’ai eu le plaisir et l’honneur de côtoyer depuis de très nombreuses années – une bonne quarantaine – notamment par l’intermédiaire de son fils Jean-Pierre à qui va toute mon amitié et toute ma sympathie attristée.
Jean-Victor Gruat »
Témoignage de Piero Rainero, ancien secrétaire départemental du PCF:
« Je viens d’apprendre le décès d’un camarade qui a été l’un des dirigeants de la fédération il y a bien longtemps; Pierre JAOUEN de Berrien et que j’ai personnellement bien connu. Il avait 92 ans.
Ce camarade avait adhéré au parti en 1946, il a été membre du comité fédéral de 1953 à 1964, du bureau fédéral de 1954 à 1961 et du secrétariat fédéral de 1954 à 1959 il avait en charge ce que l’on appelait à ‘époque « le travail parmi les paysans ». Il a été pendant quelques années secrétaire de la section d’Huelgoat et de la cellule de Berrien.
Il a exercé plusieurs activités professionnelles, cultivateur, carrier et aussi abonneur au journal « La Terre ». C’est au titre de cette dernière activité qu’il s’est fait connaitre et apprécier par les camarades et bien au delà dans toute la Bretagne; il connaissait en effet tous les petits villages de la campagne bretonne et finistérienne et le monde paysan. Cette fine connaissance nous était très précieuse pour contribuer au développement de nos idées. Je garde de lui le souvenir d’un militant discret, modeste, politiquement très fin et d’une grande efficacité.
Piero Rainero ».
Jean-Jacques Penven a prononcé ce discours d’hommage très poignant à Pierre Jaouen mercredi 9 mars au funérarium de Carhaix, où « Ma France » de Jean Ferrat, l’Internationale et les paroles de Rafael Alberti ont donné une profondeur historique et émotionnelle à ces obsèques très émouvantes.
Voici l’hommage de Jean-Jacques Penven à Pierre Jaouen en mars 2016:
« Nous perdons un ami, un camarade, Pierre Jaouen
Sa prise de conscience politique commence le 6 janvier 1934 à 11 ans, au coup de force des fascistes contre la 3ème République de triste mémoire et qui allait déboucher sur 1936, ainsi qu’il le raconte dans quelques lignes qu’il a tracées sur son enfance. A ses dires, cette date allait être déterminante pour la suite de ses activités et de son engagement.
En effet Pierre était un homme politique engagé depuis la 2e guerre mondiale. Il adhère en 1945, à 21 ans, à l’Union des Jeunesses Républicaines de France, ancêtre de la Jeunesse Communiste, et ce, à l’insu de sa famille.
Il n’a pas fait le S.T.O. Service de Travail Obligatoire, pour soutien de famille suite au décès de son père.
Il existait encore des poches de résistance car l’armée allemande était encore présente par petits groupes sur notre territoire, ce qui l’a marqué pour son engagement futur.
De retour de son service militaire en 1946, il prend des responsabilités au Parti Communiste Français. Et c’est là qu’il rencontrera sa future femme Huguette. C’est aussi à cette époque qu’il commence à lire la presse communiste engagée (l’Humanité pas seulement) qui forgera son parcours, il lisait encore l’huma il y a à peine plus d’une semaine.
Pour des raisons familiales il quitte la ferme pour prendre une exploitation agricole à Camaret avec Huguette. Pour se moderniser en matériel agricole les banques (commices agricoles) tergiversent et refusent des emprunts en raison de son engagement politique, pour les mêmes raisons il n’arrive pas à écouler sa production. Cela le contraint à quitter la ferme de Camaret pour vivre à Berrien. Et là, il travaille dans les carrières de granit locales.
Pour ses engagements militants, il utilisait son vélo pour se rendre après son travail, la nuit, à des réunions, à des assemblées ou toutes autres manifestations. Il faisait souvent 20 à 30 kilomètres pour y participer.
Il a contribué à organiser, les ouvriers et surtout les carriers, en syndicat C.G.T. pour défendre leurs revendications et leurs acquis.
A cette époque il a bien sûr connu Alphonse Penven, maire de Huelgoat et ensembles ils menèrent des actions militantes.
Vers 1958 les conséquences de son engagement contre la guerre d’Algérie lui ont valu d’être poursuivi, perquisitionné, avec mise sous scellés de son automobile pendant 1 an. Heureusement cette période a coïncidé avec son embauche au journal La Terre, ce qui lui permit d’avoir une voiture de fonction, une 2 CV, et de démarcher de nombreux petits paysans et agriculteurs pour les abonner au journal. Il y est resté jusqu’à sa retraite en 1989.
Durant cette période, il organise et participe à organiser des fêtes populaires de La Terre à Berrien, Huelgoat. Il participe activement aux fêtes de l’Humanité à Paris avec son épouse Huguette avant son décès prématuré. Il est aussi membre du Bureau Fédéral du Parti Communiste du Finistère dans les années 60, avec Louis Leroux et Gabriel Paul de Brest qui nous a quitté il y a peu, et qui a été député communiste du Finistère avec Alphonse.
Pendant sa retraite il continue à militer au P.C.F. et à l’Union Locale C.G.T. de Huelgoat. Il a été responsable de la section Multiprofessionnelle des retraités C.G.T. ainsi qu’au Conseil Départemental du Finistère.
Pierre était de tous les combats et de toutes les luttes. Nul doute qu’il aurait battu le pavé ce midi, et demain 10 mars pour la défense des intérêts des retraités, comme il le faisait il y a à peine plus d’un an au lendemain des massacres de Charlie.
Nous t’adressons un dernier salut fraternel Pierre ».