Jeanne Cariou en 1945, adjointe au maire de Brest (photo de la brochure de l’institut d’histoire sociale de la CGT: un siècle de luttes sociales en Bretagne)
« Tante Jeanne »: Jeanne Cariou – épouse Goasguen (1901-1973)
100 ans d’engagements communistes en Finistère
D’après la notice du Maitron
Née le 18 juin 1901 à Brest (Finistère), morte le 7 août 1973 à Brest ; infirmière ; militante communiste ; résistante, déportée ; élue à Brest.
Fille d’un journalier (Yves Marie Cariou) et d’une ménagère (Marie-Françoise Calvez), Jeanne Cariou, infirmière diplômée, se maria le 17 mais 1921 à Brest, avec Jean Louis Goasguen.
Elle adhéra au Parti communiste, dans la région parisienne, en 1925 puis revint à Brest avec son mari vers 1932. Membre du bureau de section à Brest, de 1936 à 1939, elle fut, dans la clandestinité, responsable du triangle de direction jusqu’en 1941. Elle est désignée en décembre 1941 comme interrégionale « femmes » de Bretagne du PCF responsable pour le travail chez les femmes. En février 1942, « Tante Jeanne »dirige l’action des femmes communistes qui organise des évasions de républicains espagnols du Fort Monbarrey, près de Brest.
Arrêtée le 29 avril 1942, à la suite d’une manifestation de ménagères qu’elle avait organisée, elle fut condamnée à deux ans de prison le 21 mai 1942 et son mari Jean Goasguen à trois années de la même peine. On la libéra en mai 1944 comme mère de cinq enfants. Déjouant la surveillance policière qui l’attendait à sa sortie de prison, comme à son domicile, elle rejoint aussitôt le maquis FTP de Brélès (Finistère) sous les ordres du commandant Foucher.
Élue au conseil municipal de Brest sur une liste républicaine et antifasciste, en mai 1945, elle fut écartée de la section pour avoir soutenu la position de André Le Roy*. Elle resta cependant fidèle à ses idées, et, en 1969, elle présida un repas fraternel des communistes brestois anciens résistants.
Son mari, Jean-Louis Goasguen fut déporté. Il mourut en 1963. Ils étaient divorcé depuis 1953.
Jeanne Cariou meurt en 1973. Un rond-point à Brest porte son nom par décision du conseil municipal du 21 juin 2002, modifiée le 11 juin 2004.
D’après notamment l’article cité: http://maitron-en-ligne.univ-paris1.fr/spip.php?article73483, notice GOASGUEN Jeanne , dite Tante Jeanne par Georges-Michel Thomas, version mise en ligne le 23 août 2009, dernière modification le 7 février 2012.
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Extrait du livre d’Eugène Kerbaul sur la section de Brest:
Résistance et répression des communistes brestois de 1939 à 1943 (à partir des souvenirs et des enquêtes d’Eugène Kerbaul, résistant communiste)
» Après la signature le 23 août 1939 du pacte germano-soviétique, une vague d’anti-communisme déferle sur la France, portée par la bourgeoisie, l’Etat et le gouvernement, les médias. Les organisations communistes sont dissoutes le 26 septembre. A ce moment, le PCF compte sur Brest environ 200 adhérents, mais beaucoup sont mobilisés. Le Parti Communiste se réorganise de manière clandestine à Brest, sous la direction de l’interrégional Auguste Havez: les groupes de trois camarades responsables de ville ou de secteur contactent les militants que la mobilisation n’a pas touchés et qui n’ont pas « lâché » le PCF pour les regrouper par groupes de trois ou quatre militants. Ces groupes n’ont pas de contact entre eux. Les camarades choisis pour former le « triangle » responsable de Brest sont Jeanne Goasguen-Cariou, Roger Chaigneau et Eugène Kerbaul. Carlo De Bortoli et Jules Lesven, responsable du secteur syndical de l’Arsenal, font parti des cadres intermédiaires… Le 28 novembre, Kerbaul part pour l’armée et Jeanne Goasguen-Cariou reste seule au triangle avec Jules Lesven. Les numéros de L’Humanité clandestines dénonçant « la guerre capitaliste » sont récupérées en gare de Brest par des femmes et distribués sous le manteau, de main en main.
En février 1940, les députés communistes sont envoyés devant un tribunal militaire. Ils seront condamnés à 5 ans de prison et la privation de leurs droits civiques le 3 avril – Ambroise Croizat est du lot, qui ira moisir dans un bagne en Algérie. En mars, les perquisitions et les arrestations vont bon train contre les communistes. En avril 1940, Jeanne Goasguen-Cariou et Jules Lesven, qui a remplacé Chaigneau dans le triangle de direction, protestent énergiquement de l’absence de ronéo (la leur était partie dans le sud-Finistère avec Alain Signor) pour localiser leurs tracts.
L’armée allemande atteint Brest le 19 juin après que le 17 juin, Pétain ait appelé à la radio à cesser le combat. Début juillet, les militaires brestois ou stationnés à Brest sont appelés à régulariser leur situation auprès de l’occupant: le 5 juillet, 2000 hommes sont envoyés dans les stalags d’outre-Rhin, dont Henri Moreau, militaire de carrière et musicien du 2e Dépôt, communiste, qui se libérera et retrouvera Brest en fin d’année.
Le parti se restructure. « Tante Jeanne »- Jeanne Goasguen-Cariou, Jules Lesven, De Bortoli, Mathurin Le Gôf entreprennent de contacter un à un tous ces militants afin de restructurer l’organisation clandestine de la ville et les environs. A l’arsenal, des camarades s’interrogent: « Est-il juste d’aller travailler dans cet établissement mis totalement au service des Allemands par Pétain? ». Ils en concluent qu’il faut continuer à agir politiquement auprès des ouvriers qui s’y trouvent et contre l’occupant selon les moyens et méthodes à déterminer au gré des circonstances. (…)
Avec le retour de ces questionnaires, on peut établir le nombre de groupes de base du Parti communiste clandestin au printemps 1941 à 300, soit environ 1200 à 1500 membres du Parti Communiste clandestin. « Il faut probablement compter, précise Eugène Kerbaul, sur un chiffre du même ordre pour les isolés et ceux que les péripéties du moment ont coupé de l’organisation ».
A Brest, « L »Huma » clandestine arrive en grandes quantités par la gare à partir d’avril 1941, en caissettes, récupérées par Yvette Richard-Castel, Jeanne Goasguen-Cariou, comme s’il s’agissait de colis ordinaires. Parallèlement, Jules Lesven et Pierre Corre ont terminé la presse nécessaire au tirage brestois de « La Bretagne ouvrière, paysanne et maritime » , le journal communiste, et l’amènent à Kerichen. C’est Kerbaul qui est chargé par Ballanger de la direction du journal.
(…)
En août 1941, les actions de résistance des militants communistes, l’invasion de l’URSS et le climat d’anti-communisme violent dans la presse et les milieux officiels, contribuent à un renouveau de l’influence communiste en milieu ouvrier. Des « Vive l’URSS », « Vive le P.C », « Vive Thorez » apparaissent sur les murs de Brest qui ne doivent rien aux militants du PCF.
Le 14 août, Vichy promulgue coup sur coup l’obligation de fidélité à Pétain et la création de tribunaux spéciaux où seront déférés les communistes. Le même jour, le haut commandement allemand annonce que l’activité communiste sera punie de mort. Le 22 août 1941, le haut commandement allemand promulgue la loi des otages: tous les Français arrêtés sont considérés comme otages et peuvent être fusillés en cas d’attentat contre l’armée allemande.
C’est à ce moment que la lutte terroriste du Parti Communiste contre l’occupant nazi va vraiment s’engager (en dehors des actes spontanés d’attentats par les O.S, comme à Brest) par des assassinats ciblés. Le futur colonel Fabien, Pierre Georges, abat ainsi un officier allemand à la station de métro Barbès à Paris le 23 août.
A Brest, depuis l’arrestation de Chaigneau et Kerbaul, ce sont Jeanne Goasguen-Cariou et Jules Lesven qui dirigent l’organisation communiste. Ils relancent un Secours Populaire clandestin avec Jean Le Nédellec, Pierre Corre, Marie Miry. Dès août 1941, les familles en difficulté recevront une aide. A l’arsenal, sur les chantiers, des quêteurs efficaces et discrets du Secours populaire reçoivent un bon accueil.
En juillet 1941, le triangle de direction brestois envisage un projet de libération des prisonniers du camp de Châteaubriant, gardé par quelques dizaines de gendarmes français. Venise Gosnat, sollicité pour accord par Jeanne Goasguen-Cariou, manifeste son opposition au projet, de crainte que les centaines de militants prisonniers venus de région parisienne ne parviennent pas à se repérer dans la campagne bretonne de nuit ni à bénéficier de caches. Néanmois, Venise Gosnat reprend l’organisation d’un projet d’évasion collective et l’infiltration des gardiens du camp de Châteaubriant.
(…)
Après les massacres de 27 militants communistes et syndicalistes à Châteaubriant le 22 octobre 1941, de 21 à Nantes, et de 50 à Bordeaux, les communistes brestois organisent une grève de protestation à l’arsenal et un dépôt de gerbe au Monument aux Morts. C’est Jean Goasguen qui porte la gerbe à déposer, sa femme Jeanne Goasguen-Cariou marche à une vingtaine de mètres derrière lui avec dans son sac le ruban où est inscrit « Aux victimes de Châteaubriant ». Lesven donne l’alerte quand arrivent des policiers en civil et les militants parviennent à s’enfuir.
La grève des ouvriers de l’arsenal est organisée le 25 octobre. Des militants se laissent enfermer pendant la nuit pour coller papillons et affiches. Un soldat allemand est blessé grièvement par des militants communistes aux abords de l’arsenal.
En novembre 1941, à l’école navale, le groupe que dirige Charles de Bortoli crève les tuyauteries provoquant l’inondation des entrepôts.
Le 22 novembre, 11 condamnations à mort sont prononcées contre les résistants du groupe « Elie », dont 3 ouvriers de l’arsenal. Ces 11 condamnés à mort seront exécutés le 10 décembre 1941 au Mont Valérien.
Simone Bastien, dite « Monique », une jeune militante communiste champenoise envoyée dans le Finistère pour réorganiser départementalement les Jeunesses Communistes, travaille à Brest depuis le domicile de Jeanne Goasguen-Cariou.
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En janvier 42, toujours, des femmes communistes brestoises, avec notamment Marie Salou et Jeanne Goasguen-Cariou, font évader des militants républicains espagnols enfermés au fort de Montbarrey sur le lieu de travail forcé, sur la base sous-marine qu’ils creusent dans des conditions terribles. Ceux-ci reçoivent de faux papiers d’identité et sont employés dans des entreprises du bâtiment avant leur départ grâce à Jacob Mendrès et Jean Jézéquel, deux militants du Parti. On sut que parmi ces évadés, il avait 3 membres du Comité Central du PC espagnol qui rejoindront l’Espagne.
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Le 28 avril 1942, Albert Abalain est arrêté avec des valises bourrées d’explosif qu’il a récupérées auprès de Pierre Berthelot à Pont-de-Buis. A leur tour, De Bortoli, Charles Cadiou, Mathurin Le Gôf, Yves Prigent sont arrêtés alors qu’ils devaient tenir une réunion de direction communiste chez Henri Moreau, rue André-Portail. Des policiers accompagnés de la Gestapo perquisitionnent chez les militants communistes, persuadés de l’imminence d’un sabotage accompagnant le 1er mai. Jeanne Goasguen-Cariou, Joséphine Le Roux, sœur du premier maire communiste de France, Daniel Le Flanchec, passé chez Doriot avant-guerre »
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Le 21 mai 1942, le tribunal spécial (français!) de Rennes condamne Jean Goasguen à trois ans de prison et sa femme Jeanne Goasguen-Cariou à deux années de prison, Jeanne Le Roux-Le Flanchec est elle condamnée à un an de prison.