Hommage à notre camarade résistant et militant communiste Fernand Jacq, fusillé en décembre 1941 après avoir été interné à Chateaubriant, sur sa tombe au cimetière de Huelgoat. Un moment très poignant avec un discours de Pierre-Yves Thomas, le secrétaire de section du PCF Carhaix-Huelgoat, retraçant la vie de Fernand Jacq, le médecin des pauvres bretonnant de Huelgoat. Photos de notre camarade Daniel Laporte ce 8 mai au cimetière de Huelgoat, une cérémonie en présence de la famille de Fernand Jacq, d’une quarantaine de camarades et de l’ancien maire communiste de Huelgoat Robert Cleuziou.
8 mai 2025 : Discours de Pierre-Yves Thomas au cimetière de Huelgoat pour l’hommage à Fernand Jacq
Photos de Jean-Luc Le Calvez et Daniel Laporte
La section PCF de Carhaix-Huelgoat, la fédération PCF du Finistère ont tenu en ce jour du 80 ème anniversaire de la fin de la seconde guerre mondiale, de la victoire sur l’Allemagne nazie et le fascisme, à rendre hommage à Fernand JACQ, en cette commune du Huelgoat où il fut médecin et un militant communiste très apprécié de la population.
Bien qu’étant né à Granville dans la manche, il arrive en Bretagne peu après sa naissance dans la petite commune de Pleyber-Christ. Élève studieux et brillant malgré une santé fragile, il s’oriente vers des études de médecine et sort diplômé de la faculté de Rennes, ville où il rencontre sa femme. En 1930, Fernand JACQ adhère au Parti Communiste Français alors qu’il est étudiant à Rennes. En 1933, il revient dans le Finistère et s’installe au Huelgoat comme médecin, terminant sa thèse de doctorat en médecine en 1934.
Sa mère écrira en 1945, qu’elle l’interrogea sur son engagement politique. Il lui répondit : « Parce que j’ai eu faim ! Et que je travaille pour qu’il n’y ait plus de misères ».
En 1937, Fernand JACQ était candidat du PCF aux cantonales au Huelgoat, il était en même temps secrétaire de la section du Huelgoat, membre du comité régional du PCF.
De 1935 à septembre 1939 Fernand JACQ sera conseiller municipal au Huelgoat date à laquelle le Parti Communiste Français sera interdit. Néanmoins Fernand JACQ participera activement à sa restructuration, dans ce pays des Monts d’Arrée.
Lorsque la guerre éclate, Fernand Jacq est contrarié de n’être pas mobilisé. Il est réformé pour raison de santé mais adresse un courrier au préfet du Finistère par lequel il demande d’être incorporé dans un régiment quelconque. Il souhaite, d’après le témoignage de sa mère, être aux côtés de ses camarades dans le combat. Sa demande est rejetée et il est contraint d’attendre l’arrivée des Allemands au Huelgoat.
A l’arrivée des troupes d’occupation à Pont-Aven, commune de résidence de ses parents, un notaire menace et rappelle les engagements politiques de Fernand JACQ à son père. Il déclare espérer que le médecin sera bientôt fusillé. Le médecin est déchu de son mandat politique par le Gouvernement de Vichy.
Le médecin est empêché par les Allemands et sa mairie collaboratrice de circuler en voiture dès la fin 1940 il n’a pas de bons d’essence pour ses déplacements.
Qu’importe, il va de village en village, à pied ou à bicyclette, dans la boue ou la neige, apporter aux malades soins et réconfort moral. Sensible au courage quotidien des paysans des Monts d’Arrée arrachant à une terre ingrate une maigre subsistance, il en est aimé à cause de sa simplicité et de sa générosité.
Naturellement, Fernand JACQ rejoint la Résistance en adhérant en 1941 au Front national de lutte pour la libération et l’indépendance de la France. Il procède à de nombreux recrutements et est l’un des organisateurs des premiers groupes de FTP (Francs-Tireurs et Partisans) dans le Finistère. En juin de la même année, il est désigné comme responsable départemental du Service Sanitaire et réussit rapidement à mettre sur pied les éléments d’une organisation qui rend de grands services à la Résistance. Fernand JACQ est arrêté le 3 juillet 1941, probablement victime d’une des innombrables lettres de délation envoyées aux autorités sous l’Occupation. Il est immédiatement conduit dans le camp d’internement de Choisel, à Châteaubriant (Loire-Inférieure).
Dans les lettres adressées à sa famille, le Docteur JACQ ne renie jamais ses engagements et redit sa fierté de partager le sort de millions d’Hommes, d’être enfermé à Choisel au milieu de camarades constituant « l’élite de la France ». Il écrit aussi : « Il y a plus d’intelligence ici que dans n’importe quel lycée de France et nous vivons dans l’attente d’un avenir que nous sentons très proche, avec la certitude de la victoire ».
L’abattement n’est donc pas de mise et Fernand JACQ est très actif dans le camp, il dispense durant sa captivité des cours de breton pour les autres otages du camp et met en place une chorale bretonne.
Côté population, l’émoi suscité par l’arrestation du médecin est grand. L’arrestation de Fernand JACQ choque donc bien la population du Huelgoat, à tel point que le Sous-Préfet de Châteaulin semble craindre que son maintien en détention ne constitue un danger dans le rapport des autorités avec la population locale.
Á la suite d’attentats à Paris, les Allemands décident de fusiller 100 otages ; neuf seront pris dans le camp de Choisel. Parmi eux figure Fernand JACQ. Vers midi, le 15 décembre 1941, ils sont conduits en plein cœur de la forêt de Juigné, au bord de l’étang de La Blisière où ils sont exécutés aux alentours de 15 heures.
Au moment du départ des otages pour le lieu de l’exécution, les prisonniers du camp de Choisel s’étaient mis à entonner la Marseillaise, certains chantèrent le Bro gozh ma zadoù, d’autres enfin entonnèrent l’Internationale en breton.
L’espoir et la résistance à l’oppression ne quitta pas ces hommes comme en témoigne encore la dernière lettre de Fernand JACQ, lettre d’adieux rédigée à ses parents le jour même de l’exécution.
Fernand JACQ ne manque pas de rappeler dans cet écrit que lui et ses camarades ne sont pas les premières victimes de l’occupant au camp de Choisel et commémore les fusillés du 22 octobre 1941. Ce jour-là, les Allemands avaient fusillés 27 détenus du camp de Choisel dont le jeune Guy Môquet (17 ans).
L’émotion est grande à la mort du médecin du Huelgoat. C’est à la libération qu’on mesurera l’impact qu’eurent ces exécutions arbitraires de civils parmi la population française.
Médecin de campagne, médecin des pauvres, profondément humaniste, Fernand JACQ était considéré comme une sorte de « saint laïc » au Huelgoat, dans la montagne rouge de l’Arrée. Il était très estimé dans toute la région du Huelgoat où il fit campagne pour le développement de l’hygiène.
Selon Pierre Guyomarc’h, ancien FTP, cité par Fernand Grenier, dans son livre, (Ceux de Châteaubriant), la mort de Fernand JACQ va susciter une vive recrudescence de l’activité patriotique dans tout le Finistère et fera lever de nombreux combattants décidés à venger JACQ et à chasser l’envahisseur.
Dans son ultime message Fernand JACQ écrit : « La mort naturelle libère l’humanité de ses fragments usés; la mort violente donne par réaction, une énergie nouvelle à cette humanité. Toute ma vie, j’ai lutté contre la guerre et pour une vie meilleure, pour le progrès. Les morts sont de grands convertisseurs. Ma mort sera utile… »
Fernand JACQ, avec la grande majorité des 700 détenus, avait refusé de signer une déclaration d’allégeance à Pétain.
Les Allemands, rapporte le grand résistant communiste Fernand Grenier, voulaient éviter de faire traverser Châteaubriant aux condamnés pour les emmener à la sablière comme les 27 fusillés du 22 octobre, tant l’émotion était grande dans la ville de Loire-Inférieure après ce crime.
Les 9 condamnés à mort communistes furent attachés aux arbres dans la forêt. Les Allemands avaient décidé d’assassiner au fond d’un bois, loin de toute agglomération.
Les communistes Finistériens sont fiers d’avoir eu comme camarade un homme comme Fernand JACQ. En lui rendant hommage aujourd’hui, ils n’oublient pas les sacrifices de ces hommes et de ces femmes, souvent au péril de leur vie, pour l’émergence d’un monde plus juste et de paix.