Européennes 2024 : la liste Deffontaines veut relever le défi du 9 juin
Les militants du Parti communiste français ont validé à plus de 92 % la liste menée par Léon Deffontaines pour les européennes du 9 juin. Elle entend faire campagne autour de trois axes : le travail, la paix et l’écologie. Et espère rassembler au moins un million de voix.
C’est la liste d’une autre voie, d’une autre gauche. « Nous sommes la seule gauche qui s’est toujours opposée aux traités libéraux européens », répète, comme un leitmotiv, Léon Deffontaines, chef de file du PCF pour les élections européennes du 9 juin 2024. Autour de lui, prêts à livrer bataille, plusieurs membres de la liste « de rassemblement » tout juste validée par 92,76 % des militants communistes. Emmanuel Maurel, eurodéputé GRS sortant qui occupe la troisième place ; Samia Jaber, porte-parole de L’Engagement, mouvement créé par l’ancien ministre socialiste Arnaud Montebourg ; ou encore Hélène Bidard, adjointe PCF à la mairie de Paris.
« Nous avons tenu à diviser cette liste en trois parts égales, précise le candidat lors d’un point de presse à Colonel-Fabien, siège parisien du PCF. Une première composée de dirigeants et élus communistes, une deuxième de responsables d’autres formations de gauche qui ont répondu à notre volonté d’union, et une dernière de représentants du monde du travail qui subissent de plein fouet l’inflation et le recul du pouvoir d’achat. »
Travail, paix et écologie
Dans le détail, les 81 places de la liste, dont six sont vacantes pour « laisser la porte ouverte à d’autres ralliements pour un rassemblement plus large », sont occupées par des personnalités bien connues. Chez les dirigeants communistes figure en cinquième position André Chassaigne, député du Puy-de-Dôme, très investi dans la ruralité et l’agriculture, à l’origine notamment de la volonté d’instaurer des prix planchers pour assurer une juste rémunération des paysans. Fabien Roussel, secrétaire national du PCF, ou les sénateurs Pierre Ouzoulias et Cécile Cukierman sont également présents, « en soutien » en queue de peloton.
Du côté de la société civile, une forte présence d’engagés de terrain est à relever. Comme celle de Fabien Gâche, syndicaliste CGT chez Renault, et de Manon Ovion, préparatrice de commandes chez Vertbaudet. Déléguée du même syndicat, elle a mené une grève historique pendant 75 jours l’an dernier, jusqu’à obtenir des augmentations conséquentes pour toutes les ouvrières de la marque. Marylène Faure, agente EDF, est aussi sur la liste, pour mieux souligner l’engagement des communistes sur les questions énergétiques.
Le nom de la liste a aussi été dévoilé, comme un slogan : « Reprendre la main en France et en Europe. » La campagne se déroulera à partir de trois « axes principaux ». En premier lieu, les questions du travail et du pouvoir d’achat seront défendues ardemment, a martelé la tête de liste : « On a aujourd’hui une Union européenne qui a comme bilan la pauvreté, le recul de nos services publics, de nos industries, la fermeture et la disparition d’un certain nombre d’exploitations agricoles… Et cette Europe-là, nous n’en voulons plus. Nous voulons une Europe capable de réindustrialiser massivement notre pays et notre continent. »
L’écologie sera le deuxième des piliers de la campagne, en portant notamment un discours qui est différent de celui des « écolos attentistes ». « Certains s’opposent par dogmatisme à la possibilité de réaliser de grands travaux, a poursuivi Léon Deffontaines. Nous nous inscrivons en contradiction : si nous voulons atteindre la neutralité carbone en 2050, il faut engager partout sur notre territoire des grands travaux utiles, des grandes rénovations de bâtiments, et de grandes infrastructures ferroviaires et fluviales. »
Enfin, les communistes entendent se frotter au sujet qui agite en partie le début de cette campagne : la guerre en Ukraine. « Quand j’entends les va-t-en guerre, la majorité présidentielle ou le président de la République utiliser les mêmes mots que ceux qui nous disaient qu’il fallait intervenir en Irak en 2003, je dis que nous avons une autre voie à porter », a détaillé la tête de liste.
Citant les propos de l’époque de Jacques Chirac, voyant dans la guerre « toujours la pire des solutions », le candidat a précisé vouloir « porter une voix de paix » : « Il faut aider les Ukrainiens face à l’invasion pour empêcher la Russie d’avancer et tenter de geler le front et, parallèlement, il faut que la France et l’Union européenne puissent porter un traité de paix avec un enjeu primordial : un cessez-le-feu. »
Objectif 5 %
Au début du mois de février, Fabien Roussel avait fixé un objectif clair pour cette liste : « Nous avions rassemblé 560 000 voix en 2019, il nous en faut au moins un million cette année. » Un cap maintenu par Léon Deffontaines qui affirme viser 5 % des suffrages, barre synonyme d’élection de députés européens.
Et même si la liste communiste entend porter une autre voie que celles des listes socialistes, écologistes ou insoumises, la campagne ne sera pas marquée par un affrontement frontal à gauche. Les premiers adversaires restant le RN et la majorité présidentielle. « Le vote utile, c’est le vote pour la liste que nous rassemblons afin, notamment, de permettre aux quatre listes de gauche de dépasser les 5 % et de faire élire cinq députés en plus pour la gauche, et surtout de faire perdre cinq députés à la droite et à l’extrême droite », a poursuivi Léon Deffontaines.
Dans tous les esprits, le souvenir de 2019 est présent. À l’époque, Ian Brossat, tête de liste communiste derrière le slogan « L’Europe des gens, pas l’Europe de l’argent », n’avait pu rassembler que 2,5 % des voix malgré une campagne remarquée. Cette liste pourra-t-elle faire mieux, cinq ans plus tard ?
« Depuis 2019, un certain nombre de crises se sont succédé, répond Emmanuel Maurel. La crise du Covid, qui a mis en évidence un certain nombre de dépendances et de vulnérabilités, et puis la guerre en Ukraine qui a mis au cœur du débat la question de la souveraineté énergétique et a rendu plus aigus encore les sujets autour de la souveraineté industrielle, alimentaire et même numérique ou culturelle… Autour de ces questions, nous portons aujourd’hui une voix singulière qui répond à des aspirations très précises dans ce qu’on appelle le peuple de gauche. » Samia Jaber, conseillère départementale du territoire de Belfort et porte-parole de L’Engagement, surenchérit : « Un espace s’est ouvert à gauche pour ceux qui se sont toujours opposés à la construction d’une Europe libérale qui va droit dans le mur. »
Dans ce sens, le choix d’implantation du premier grand meeting de campagne de la liste de Léon Deffontaines, le 11 avril, fait figure de symbole fort : Amiens, dans la Somme, terre d’origine du candidat, mais aussi et surtout celle d’une partie de la « France du non » au traité constitutionnel européen de 2005. « C’est un territoire qui a connu, peut-être avant beaucoup d’autres, ce qu’est l’Europe libérale : la désindustrialisation, la mise en concurrence des travailleurs… Et c’est à ce public-là que l’on souhaite s’adresser en priorité. »