Mon cher Jean,
Ton départ si brutal a provoqué une grande émotion chez tes amis, tes camarades, tous ceux qui te connaissaient.
Nous ne reverrons plus ta grande silhouette, ton sourire amical, ironique parfois, nous ne bénéficierons plus de tes réflexions si pertinentes, si justes, de ta chaleureuse présence. Tu resteras cependant toujours présent à nos côtés.
Il est difficile de dire en quelques mots l’homme que tu étais, la place que tu as occupée parmi nous.
Nous nous connaissions, Jean, depuis si longtemps. Depuis ton retour en Bretagne, dans notre ville, en 1978, après le passage obligé que tu avais fait par Paris comme presque tous les salariés de la Poste à cette époque, les PTT comme on disait alors.
Une entreprise publique, c’était important pour toi.
Originaire de Berrien, ton travail t’avait contraint à quitter cette terre rouge, cette terre de Résistance du centre Finistère à laquelle tu étais si intimement attaché.
C’est en 1962 au retour de la guerre d’Algérie que tu as rejoint le Parti Communiste. Appelé du contingent entraîné malgré toi dans cette guerre, c’est en communiste que tu te comportais déjà dans ton régiment, refusant de porter les armes contre un peuple qui se libérait du joug colonial. Cela te valut de subir des sanctions allant jusqu’à la prison qui ne réussirent jamais à altérer tes valeurs humanistes. Toi dont les parents avait été des résistants déterminés au nazisme. Leur souvenir était très présent dans ta mémoire familiale.
À Paris tes camarades te confièrent des responsabilités en t’élisant au comité fédéral. Paul Laurent, alors secrétaire de la fédération de Paris et membre du secrétariat national, me dit un jour toute l’estime et la considération qu’il avait pour toi. Je me souviens que lorsque je t’avais rapporté ces propos, un sourire discret avait glissé sur ton visage.
Dans le 6ème arrondissement où tu demeurais, tu fus élu secrétaire de la section communiste et les militants te choisirent pour être candidat sur la liste de la gauche rassemblée aux élections municipales de mars 1977.
Lors d’un repas amical chez toi au cours duquel Yvonne et moi avions apprécié tes qualités de cuisinier, tu me remis des photos et des documents témoignant de tes nombreuses activités politiques de l’époque : meetings électoraux, défilé en hommage aux Communards, vente de l’Huma Dimanche, distributions de tracts, manifestation où apparaissaient côte à côte Georges Marchais, Jacques Duclos, Roland Leroy, Georges Séguy, Henri Krasucki…Tu avais milité à leurs côtés.
Mais comme tout Breton contraint de s’expatrier, tu voulais revenir en Bretagne et c’est ainsi qu’en 1978, avec ta famille, tu es arrivé à Quimper.
Sans attendre tu as pris ta place à nos côtés dans les luttes pour les droits des travailleurs, la paix, la solidarité, les droits humains.
Aussitôt arrivé, des responsabilités te furent confiées à la section de Quimper ainsi qu’à la direction fédérale et tu fus à plusieurs occasions candidat aux élections municipales et cantonales dans notre ville.
La retraite venue, tu étais toujours présent dans nos débats, nos initiatives, aimant le contact avec les gens, nous faisant bénéficier de ton expérience. Tu étais à 87 ans le doyen de la section mais tu avais su garder l’esprit, les convictions de ta jeunesse. Et la nécessaire rébellion devant les injustices de la société.
Infatigable militant de terrain, on te voyait sur les marchés, dans les manifestations pour le pouvoir d’achat et les retraites, pour l’hôpital, pour la Poste et les services publics qui te tenaient tant à cœur, encore ces dernières semaines pour la justice et la paix au Proche-Orient.
Tu étais aussi un militant de réflexion, posé, attentif aux autres, respectueux avec tous. Dans les moments de grande complexité politique comme ceux que nous traversons tu avais toujours l’idée et le mot juste, dans l’esprit des valeurs communistes qui t’ont animé toute ta vie.
Je me souviens des échanges nombreux que nous avions lorsque tu venais me voir dans mon bureau à la fédération, de tes appels téléphoniques, des lettres amicales que tu m’adressais.
Si ta vie politique et syndicale étaient bien remplies, ta famille, ta fille Catherine, tes petits-enfants et ton arrière petite-fille avaient une place essentielle pour toi, tu en parlais avec affection et fierté.
Ainsi que Marie avec qui tu as partagé ces dernières années. Tu appréciais les voyages faits ensemble en Italie, aux États-Unis chez tes amis, à la Martinique où vous séjourniez parfois plusieurs semaines. Tu n’oubliais jamais de nous adresser une petite carte postale comme un clin d’œil amical.
Adieu Jean, soit assuré que ton souvenir restera dans nos mémoires, celle des tiens, de tes camarades, de tes amis, de tous ceux qui t’ont connu et apprécièrent en toi l’homme droit, sincère, généreux, d’une grande sensibilité, toujours discret, qui est resté fidèle à ses convictions de liberté, de fraternité, de justice sociale, de paix.
Je vous adresse, Catherine et Marie, les condoléances du parti communiste, de son secrétaire départemental Ismaël Dupont, du sénateur communiste Gérard Lahellec qui avait milité avec Jean au syndicat CGT des Postes et Télécommunications.
Et je vous renouvelle à toutes les deux ainsi qu’à vos proches, en mon nom et en celui d’Yvonne, l’expression de notre profonde sympathie.
Jean tu vas nous manquer.